Christophe Henning – Prier 15 jours avec Christian Bobin, poète de la joie
Nouvelle Cité – avril 2024 – 128 p. – 12€
Pour le lecteur peu habitué à la poésie, pour ceux qui ne connaîtraient Christian Bobin que de nom, comme pour ceux qui auraient lu Le Très-bas, ou pour les passionnés du poète décédé en 2022, l’ouvrage que Christophe Henning lui consacre est à recommander.
Ce livre, paru dans la collection « Prier 15 jours avec… » des éditions Nouvelle Cité, se présente en réalité comme un cheminement biographique. Christophe Henning propose de marcher au pas de Christian Bobin, de son enfance à sa mort, au fil de pages rythmées par les extraits de son œuvre.
On y découvre la vie simple d’un poète ancré dans son terroir du Creusot, célébrant la fugacité de la beauté, à l’affût de ce qui peut être remarquable au cœur du quotidien. La foi personnelle de Christian Bobin s’exprime dans une manière d’être présent au monde, une contemplation de la nature qui permet de vivre et voir au-delà de la superficialité. Ce petit livre témoigne d’une forme d’attention particulière, engage le lecteur à exercer et accroître sa capacité à s’émerveiller.
Il est pour autant profond, sans mièvrerie. Christian Bobin évoque avec pudeur le deuil de celle à laquelle il avait ainsi dédicacé son livre sur Saint François d’Assise, Le Très-Bas : « À Ghislaine Marion, délivrant par son rire, tous les chemins de l’encre[1] ». Il évoque la maladie d’Alzheimer de son père, les épreuves traversées sans qu’elles aient raison de l’espérance, ni de la joie : « Ce que j’appelle le printemps ne va pas sans déchirure. C’est une chose douce et brutale. Nous ne devrions pas être surpris de ce mélange. Si nous le sommes, c’est que la vie nous rend distraits[2]. ».
Christophe Henning signe un livre accessible et discret, l’auteur s’efface pour mettre en valeur les textes du poète. Il présente son ouvrage comme un livre « tout entier pétri des mots de Christian Bobin. [Il] n’appartient ni à son auteur, ni même à son lecteur[3] ».
Pour septembre, ce beau livre invite à faire un pas de côté, s’éloignant du débat d’idées, légitime par ailleurs. Le déroulement du propos, sous son apparente simplicité, appelle pourtant à une véritable résolution au seuil de la rentrée. Il ravive l’appel à la conversion, en commençant par une forme de rééducation du regard : « Chaque jour est une lutte avec l’ange des ténèbres, celui qui plaque ses mains glacées sur nos yeux pour nous empêcher de voir notre gloire cachée dans notre misère[4]. »
[1] p. 12
[2] p. 90
[3] p. 115
[4] p. 97