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Note de synthèse N°1

A.Wénin, Genèse 1-11 ou les errances de l’humain,

Chapitre 1 : Un monde selon Dieu (p. 17 à 48), Genèse 1, 1 – 2, 4

 

Période :
15 janvier 2023 - 12 février 2023
Document à télécharger :

Genèse, A. Wénin ch. 1

Notes et réflexions n° 1 (15 janvier-15 février)

Vous avez balayé un bon nombre de questions sur le texte de Genèse 1 et sur ce premier chapitre .
Je souligne quelques acquis :

1- Evidemment nul n’a assisté à la création, et celui qui parle (le narrateur) donne la parole au seul acteur du récit : Dieu. D’une certaine façon, il invite le lecteur à contempler Dieu créant, à voir par ses yeux et à s’émerveiller avec lui au fur et à mesure que le monde se constitue.
Ainsi je dirais volontiers que le texte est une liturgie célébrant la beauté « ordonnée et équilibrée » du monde créé sous la forme mythique d’un récit de commencement, où tout est œuvre de Dieu.
J’ajoute enfin que la grande leçon de ce texte, que l’on ne souligne pas assez, c’est que la seule réalité originelle, dans la relation de Dieu à la création, c’est la bénédiction.

Récit de commencement, et non d’origine, car l’origine est en Dieu qui « crée », avec un emploi du verbe « créer » qui, dans la Bible, lui est réservé. Et dès qu’il crée en dehors de lui-même (le ciel et la terre), Dieu crée le temps, qui commence et va se déployer, rythmé par l’alternance nuit/jour, le cours des astres et les jours de la semaine selon un comput fixé par le créateur  lui-même.
Dieu crée en séparant le tohu bohu qui est désordre et confusion (fusion aussi ), et il n’est donc pas question de création  ex nihilo.
On n’oublie pas que la « cosmologie » de l’auteur est celle des contemporains : la terre est un disque plat qui flotte sur l’eau (les eaux d’en bas), un couvercle piqué d’étoiles et de luminaires la sépare des eaux d’en haut, la pluie. Le risque d’inondation est permanent, même si l’équilibre du texte semble confirmer une certaine stabilité.
Dieu crée par la parole, peut-être en maîtrisant son souffle, la Ruah, qu’on peut aussi comprendre comme la force créatrice, la force de vie !

Ce Dieu qui donne la vie porte le nom courant (et à l’origine pluriel) d’Elohîm. Dérivé du nom El du grand dieu du ciel mésopotamien, Elohîm est aussi un nom où chacun peut reconnaître son propre Dieu, et le pluriel unifie tous les dieux sous l’unique Créateur de l’univers.
Wénin remarque que la récurrence du verbe « être » (ou plutôt du verbe de la vie  « que soit »), peut évoquer le nom imprononçable du Dieu d’Israël très proche du radical de ce verbe, et par là affirmé comme l’Unique créateur de toutes choses.

L’apparition successive des différents ordres du vivant n’a rien à voir avec une théorie de l’évolution avant l’heure. Elle relève de l’observation la plus ancienne et la plus courante de la nature végétale et animale.

2- Ce qui est frappant par la récurrence rythmée de l’expression, c’est la distance que Dieu prend, non plus seulement  pour parler, mais pour voir « que c’est bien/bon ». Faut-il considérer que Dieu prononce ces paroles ou qu’il s’arrête en prenant du recul pour contempler sa création ?
En tout cas, lorsqu’il a créé les premiers animaux, Dieu les bénit : Dieu bénit, dit du bien, et accompagne de cette bénédiction tout ce qui est porteur de vie.

Wénin souligne enfin que le septième jour durant lequel Dieu « cesse » fait partie de la création et du processus créateur.
Bien sûr, ce 7ème jour assure par un jeu de mots (shebi’ sept/ shabbat cesser) la loi du repos du sabbat, qui se met définitivement en place durant l’exil  à Babylone et deviendra une marque fortement identitaire.
Mais la remarque porte sur le fait que ce repos de Dieu est un moment intégrant de la création : créer pour Dieu, c’est aussi cesser et se retirer. Ce qui met une limite à sa « toute-puissance », comme il l’avait déjà fait en prenant du recul pour admirer et bénir.
 

3-Lors de la « création » de l’humain, Wénin souligne qu’il s’agit d’un verbe « faire » au pluriel.
Le pluriel, trace d’une cour divine, est lu par Wénin comme une invitation faite aux humains à participer à l’œuvre créatrice. La pointe de la démonstration s’appuie sur l’expression « en notre image, comme notre ressemblance », avec la reprise deux fois de l’image.
Les pères de l’Eglise ont écrit des centaines de pages sur ce passage nécessaire à opérer entre l’image et la ressemblance toujours inachevée… Comme une œuvre que l’humanité devra accomplir elle-même, un chemin à suivre pour atteindre la pleine ressemblance (ou la pleine image, le vocabulaire varie) de Dieu.
Paul parlera en 2 Corinthiens 4, 4  de « la gloire du Christ, qui est l’image (eikôn) de Dieu ».

Si l’humanité est d’abord mâle et femelle, plurielle comme les animaux, elle va recevoir une mission : soumettre et dominer le monde animal. Des termes de domination, aussitôt définis par une nourriture qui reste végétale, et donc interdit toute violence en excluant de verser le sang.
Dominer et soumettre à l’image de Dieu, par la parole et sans violence.

Wénin en conclut qu’il s’agit alors pour les humains de maîtriser leur propre animalité, leur propre violence ; devenir pleinement humain, c’est rejoindre l’image d’un Dieu qui crée par son souffle maîtrisé, par la parole, et en se retirant pour s’émerveiller, et donner du repos à la création…
 mais aussi pour mettre l’humain en piste, lui passer le relais ?

On est loin du compte !!!
Heureusement il y a une suite…