Il existe aujourd’hui, en France, en bien des régions, des hésitations pour savoir si, pour célébrer le dimanche, il convient de privilégier l’Eucharistie ou la célébration de la Parole. On peut s’interroger sur ce qui est réellement en cause dans les difficultés de ce choix : est-ce l’importance majeure de l’Eucharistie dans la vie chrétienne, le souci de valoriser le rôle spécifique des prêtres, les obstacles pratiques liés au déplacement des chrétiens ? Autre chose encore ?
Il importe de rappeler qu’il ne saurait y avoir de concurrence entre l’Eucharistie « centre et sommet de toute la communauté chrétienne » (Décret sur la charge pastorale des évêques, n° 30) et les Assemblées de la Parole. Cela demande que les horaires soient aménagés en conséquence. De plus, le déroulement de la Parole ne doit pas ressembler à une messe au rabais, comme ont pu le manifester, il y a quelques années, les ADAP (Assemblées Dominicales en l’Absence de Prêtres). Il existe aujourd’hui des livres ou des manuels qui évitent ce danger et surtout qui constituent des outils précieux au service des animateurs de célébrations (Voir, en particulier, les ouvrages Célébrons le Dimanche, de M. Clavier et de M. Metzger, aux éditions « du Signe ») ». De plus, il est fréquent, en notre temps, que les obsèques religieuses soient animées par des laïcs préalablement formés pour cette mission.
Sans doute est-il utile de rappeler que les célébrations dominicales de la Parole ont l’agrément des plus hautes autorités de l’Église catholique, à commencer par le Concile Vatican II dans la Constitution sur la Liturgie (n° 35,4). Mais d’autres textes officiels sont venus compléter cet enseignement : ainsi l’exhortation apostolique sur la Parole du pape Benoît XVI en 2010.
Doit-on choisir entre l’Eucharistie et la célébration de la Parole ? Cela ne paraît pas une bonne manière de poser la question. Célébrer la Parole de Dieu ne résulte pas d’une sous-estimation de l’Eucharistie mais de la nécessité pastorale de célébrer, en assemblée, le jour du Seigneur. Les célébrations de la Parole sont des célébrations dominicales dans des églises privées de l’Eucharistie. La réponse à la manière de « célébrer le dimanche » ne peut se préciser qu’au sein d’instances de consultation et de décision. Certains synodes diocésains s’en préoccupent.
Sous peine « de créer le désert », notamment dans le monde rural, il importe que les communautés chrétiennes de proximité se réunissent pour une Liturgie de la Parole de Dieu, autant que possible selon un rythme hebdomadaire. D’après l’expérience de plusieurs diocèses, il semble toutefois opportun de prévoir, de temps à autre, des « rassemblements eucharistiques » regroupant plusieurs communautés locales, spécialement aux grandes fêtes.
Deux fondements légitiment l’importance donnée au rassemblement dominical des communautés de proximité. D’une part, c’est la communauté chrétienne qui est sujet intégral de l’action liturgique : « Les actions liturgiques ne sont pas des actions privées mais des célébrations de l’Église… » De ce fait, la participation active des laïcs n’est pas une concession, mais elle est « demandée par la nature de la liturgie elle-même » (Constitution sur la Liturgie, n°14).
D’autre part, il est très opportun de rappeler que la présence du Christ à son Église ne se limite pas à l’Eucharistie, comme le précise le Catéchisme de l’Église catholique (n° 1088). Le Christ est présent aussi « dans sa parole, car c’est Lui qui parle tandis qu’on lit dans l’Église les Saintes Écritures ».
Cette présence est d’ailleurs soulignée dans l’acclamation de l’Évangile : « Acclamons la Parole de Dieu – Louange à Toi Seigneur Jésus. » On n’acclame pas un beau texte. On loue Celui qui se rend présent par cette Parole, Celui qui « est » cette Parole.
Jean Rigal, théologien.
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AuteurJean RIGAL