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Le premier point qui est intéressant, c'est que vous nous racontiez ce qui a déterminé votre engagement dans l'Église, votre famille, les copains, les scouts...

Cela est pour moi très important, car cela n'est pas banal. Mon père est mort quand j'avais 12 ans, je suis resté avec ma mère et sa sœur, ma tante, et toute la famille. Mon père qui n'était plus là, mais il m'avait marqué évidemment. Toute la famille était incroyante… disons plutôt anticléricale. J'ai grandi et j'ai donc vécu dans un milieu très anticlérical et très peu porté sur la religion, c'est le moins que l'on puisse dire.
La foi ? Je ne suis pas sûr qu'ils étaient complètement incroyants, mais enfin ce n'était pas loin et puis malgré tout, puisque cela se faisait, on m'a fait suivre le caté. J'ai fait ma première communion, on disait la Communion solennelle à l'époque et on a accepté que j'aille chez les scouts. J'étais ado et je commençais déjà à prendre mes libertés, parce que moi, ça m'intéressait finalement le caté. Le curé me plaisait beaucoup. L'Église était pour moi un lieu familial, un autre lieu familial donc je ne comprenais pas du tout pourquoi mon milieu familial officiel se tenait tant en dehors. On m'a donc laissé aller chez les scouts. C'est chez les scouts, avec l'aumônier que s'est développée en moi la foi, et vraiment un grand intérêt, plus que celui de mes copains. Nous avions tous la foi théoriquement, mais pour moi cela était plus profond. Je ne pensais pas du tout à la vie religieuse, ni même à être prêtre à ce moment-là, mais j'étais quand même très embarqué là-dedans. Je suis devenu chef [NDLR : scout] à mon tour et là a commencé à se poser pour moi le rapport aux filles et en même temps l'idée que je pourrais peut-être bien avoir une vie consacrée à Dieu. Il y a eu un moment de flottement où je me suis dit : « Il faut que je me décide : ou je fréquente une jeune fille, je me marie et j'ai des enfants. Ou bien alors j'entre dans la vie religieuse, je ne sais pas encore exactement où, ni comment. » Je m'en suis ouvert à ma mère qui a marqué sa profonde désapprobation, à tel point que j'ai renoncé. C'était juste au moment du bac. C'est à ce moment-là qu'il fallait s'orienter, ma mère m'a demandé ce que j'avais l'intention de faire. Je n'en savais rien, car j'avais envie d'entrer au séminaire... disons en gros, je n'avais pas de choses précises en tête. Elle m'a alors suggéré de faire des études de pharmacie, car elle avait évoqué cette possibilité avec mon père : « Avec ton père, on s'était dit que ça serait bien que tu fasses pharmacie, que tu sois pharmacien, c'est un beau métier et ça rapporte bien. » J'ai donc opté pour des études de pharmacie. Elle m'aurait dit de faire n'importe quoi d'autre, cela aurait été pareil, absolument pareil. Je me suis donc inscrit en Fac de pharmacie, à Paris. J'en suis sorti avec le diplôme de pharmacien, à ce moment-là j'avais l'intention de me marier. Je n'avais pas du tout envie de travailler dans une officine, car je voulais faire de la recherche. J'ai donc cherché du travail et j'ai été embauché aux laboratoires Debat, dans le service de recherche. J'y ai travaillé 4 ans. Ces 4 années n'ont fait qu'augmenter mon désir de me donner à Dieu. Si bien que j'ai déclaré un jour à ma mère et à ma tante : « Cette fois c'est clair, j'ai fait tout ce que vous vouliez, mais maintenant j'entre chez les dominicains. »
En effet, j'avais rencontré entre temps, des aumôniers scouts ou routiers, j'avais aussi été commissaire [NDLR : Responsable à l'échelle locale de plusieurs groupes] et j'avais rencontré plusieurs dominicains, dont le Père Liégé [NDLR : ancien aumônier national de la branche Route chez les Scout de France] avec lequel j'ai beaucoup sympathisé. Nous nous sommes très bien entendus, nous avons travaillé ensemble. C'est donc chez les dominicains que j'ai eu envie d'entrer. Le père Liégé m'avait fait visiter le Saulchoir [NDLR : un des couvent de formation dominicain dans la banlieue de Paris], et il m'avait reçu au couvent de Saint-Jacques (Paris). Tout cela m'allait très bien. J'ai donc quitté ma mère et ma tante, j'ai quitté le laboratoire évidemment pour faire un noviciat d'un an à Lille. Ensuite j'ai fait mes études au Saulchoir, comme tous les frères de la Province de Paris. Puis j'ai été assigné à Saint-Jacques. Ma vie dominicaine s'est enclenchée comme ça.
De ce que ma famille m'a inculqué, il me reste un certain anticléricalisme, j'ai gardé un peu de ça au fond de moi. Je reste toujours très prudent envers tout ce qui est institution et tout ce qui est clérical.

Vous entrez donc au couvent Saint-Jacques, à quelle époque ?
En 1963, j'ai fait ma profession solennelle, en 1965, mon ordination sacerdotale, j'avais 30 ans. C'est Mgr Jean Sauvage qui m'a ordonné. J'ai été assigné au couvent Saint-Jacques à Paris, le 10 novembre 1966.
À ce moment-là j'ai été directeur du « Centre Lacordaire » et animateur des journées presbytérales. Tous les mois nous recevions des prêtres, pour une journée de formation. J'ai été animateur de ces journées pendant plusieurs années. J'étais chargé de cours au « Centre Notre-Dame », au centre diocésain de catéchèse, j'ai fait des sessions de formation permanente de prêtres, surtout dans le Nord et le Pas-de-Calais. Voilà pour mon séjour parisien. En 1980 j'ai quitté Paris pour Étiolles, où les dominicains avaient une petite maison. J'ai été assigné là, peut-être à ma demande. J'y ai travaillé longtemps, et de très près, avec Mgr Guy Herbulot qui a été évêque d'Évry, il a été pour moi un ami très très proche, tout évêque qu'il était. Et puis avec Olivier Morand qui était son vicaire général, puis Michel Dubost [NDLR : évêque d'Évry]. J'ai été directeur de la revue diocésaine Info91, revue dans laquelle j'ai beaucoup écrit. Voilà mes souvenirs de la région parisienne.

C'est un parcours très atypique dans la mesure où vous étiez dans un environnement familial relativement hostile, indifférent à l'institution et c'est par le scoutisme peut-être que votre vocation s'est déterminée.
Oui c'est certainement par le scoutisme.

Qu'est-ce qui vous a fait choisir cette direction-là ?
Ah ! Vous savez, j'ai un tempérament d'absolu, pour moi : blanc c'est blanc et noir c'est noir !
À partir du moment où je prenais vraiment conscience de l'importance de la foi, de Dieu, du Christ, du Mystère Pascal etc., à partir du moment où je travaillais ça et où j'entrais vraiment là-dedans, tout le reste ne comptait plus. Il fallait que je m'y donne complètement, pour moi c'était une évidence. Je comprenais très bien que d'autres agissent ou réagissent autrement, mais pour moi, avec mon caractère absolu, à partir du moment où je voyais l'importance de la foi chrétienne, l'importance du mystère chrétien, enfin judéo-chrétien, eh bien ! Tout le reste ne comptait plus et donc je me donnais complètement, c'était ma vie.

Donc ça été votre vie, votre engagement.
Tout ça entre 25 et 30 ans. Ce n'était pas une décision d'adolescent, c'était réfléchi, enfin je veux dire cela avait été travaillé.

Vous avez choisi les dominicains, malgré la vie monacale, mais pour vous ça été quoi d'être prêtre ?
Pour moi c'est la mission. Vous parlez de vie monastique, en effet j'ai été tenté à un moment, j'ai réfléchi à la possibilité de me faire moine, carrément ! Moine dans un monastère et puis ce qui a emporté la décision, c'est le caractère absolu de la vie monastique qui correspondait pour moi à cet absolu dont je vous parlais : se donner totalement, donner sa vie complète... Mais il y avait aussi en moi et par le Père Liégé, par tempérament aussi peut-être, je n'en sais rien, il y avait cette nécessité de la mission, de l'annonce, je ne pouvais pas garder cela pour moi tout seul, c'est trop important, c'est trop beau, c'est trop grand. Ce n'était pas possible que je garde tout cela pour moi.

Autrement dit l'ordre des frères prêcheurs...
C'était l'idéal, il y avait la part monastique dont je rêvais en partie et puis toute la part apostolique, toute la part missionnaire et donc à ce moment-là, je ne me suis pas posé la question en terme de prêtrise. Si c'était aujourd'hui, enfin quand je dis aujourd'hui, c'est depuis maintenant 10 ans, 15 ou 20 ans, enfin dans la deuxième partie de mon existence de frère prêcheur, je me poserais vraiment la question. En effet il y a des frères qui ne sont pas prêtres, il y en a de plus en plus qui choisissent de ne pas être prêtre, il y en a deux par exemple dans ce couvent, et quand je les vois, quand je pense à eux, je me dis que j'aurais pu me poser cette question, parce que ce n'était pas le sacerdoce qui m'intéressait, à savoir le sens liturgique, le sens sacramentel, mais c'était la rééducation, c'était l'aumônerie, le partage, l'échange, la discussion, pour ça je n'avais pas besoin d'être prêtre...

L'intelligence de l'Évangile ...
Le partage, l'annonce évangélique comme vous disiez, la discussion avec l'incroyant, avec l'incroyance. Ça, ça m'a toujours passionné et c'était cela mon horizon, ma perspective. C'était celle-là, ce n'était pas du tout le sacerdoce au sens sacramentel. La célébration, bon ! Je n'étais pas contre, je n'ai jamais été contre, mais je ne m'y suis jamais investi.

Vous êtes rentré dans l'ordre au milieu des années 60 et le concile de Vatican II était déjà bien entamé.
Oui, attendez, le concile Vatican II s'est ouvert en 1962, à cette époque, j'étais au Saulchoir. J'ai commencé mes études à Lille avant le concile, et le concile est arrivé à ce moment-là ! Nous suivions ça avec passion, absolument !

Oui ! Parce que en plus vous aviez chez vous deux des piliers du concile : le Père Congar et le Père Chenu.
Cela correspondait tellement à nos recherches, à nos attentes, à nos critiques sur l'Église et sur l'état de l'Église, c'était une ouverture. Pour nous, c'était une bouffé d'air extraordinaire, la libération… La libération !

C'est drôle de vous entendre dire ça. Libération de quoi ? Parce que vous, vous n'aviez pas connu l'état de l'Église avant le Concile, puisque vous avez été élevé dans un milieu agnostique et anticlérical !
Mais si ! J'ai quand même fait mon catéchisme, ma communion solennelle, puis ensuite le scoutisme essentiellement. J'étais dans les milieux cléricaux, mais dans un milieu clérical que Vatican II allait bénir par opposition à un clergé que je ne fréquentais pas du tout, mais dont j'entendais parler et que je rencontrais ici où là.

Mais autrement dit, s'il n'y avait pas eu Vatican II, est-ce que vous seriez resté dans l'Institution ?
Hypothétiquement je ne sais pas. Si Vatican II avait capoté, si le pape était mort, je ne sais pas comment l'ordre aurait réagi et moi là-dedans... Mais de mon temps la question du départ ne se posait pas tellement, il y en a probablement qui sont partis, mais nous n'en parlions pas, nous étions dans un élan positif. Nous étions avec la province de France, les dominicains de la rue Saint-Jacques et du Saulchoir, nous étions dans un dynamisme... Nous nous serions battus, nous aurions râlé, nous aurions gueulé, nous aurions tout cassé, mais nous n'aurions pas quitté, car nous étions dans l'élan. Ce que je remarque aujourd'hui, où on a plutôt l'impression que....

C'est plus étouffant en ce moment...
Oui. J'ai l'impression, même s'il y a des frères jeunes, j'ai l'impression qu'ils manquent de ce que nous avons connu... Nous ! Nous avions le feu, le feu !
Nous avons été très très heureux avec le concile et autour du concile. Nous pouvons dire globalement avec les frères que nous avons été très heureux.

Vous êtes rentré dans l'Ordre aux alentours de 1968. Vous avez vécu à Paris tout le chamboulement qui a suivi...
Oui, ça oui ! Parce qu'en 68 j'étais à Saint-Jacques.
Nous, nous avions fait un peu notre Mai 68 dans l'Ordre, dans l'Église, calmement, moins brutalement, mais nous avions fait notre Mai 68, si bien qu'on n'a été ni étonnés, encore moins scandalisés de ce mouvement étudiant, sauf de temps en temps à propos d'exagérations évidemment, mais globalement cela correspondait tout à fait à notre aspiration, à notre ouverture, ah oui ! On s'entendait très très bien... On a reçu très souvent les étudiants à Saint-Jacques. Nous allions à leur rencontre, nous allions à toutes les manifs parfois, oui, oui nous avons vraiment participé à mai 68, on n'a pas jeté des pavés, mais c'est tout juste (rire).

Pour revenir à la société, comment voyez-vous son évolution, en dehors de l'Église, la société telle qu'elle est en ce moment aussi bien française qu'européenne ou mondiale ?
La question est vaste ! Globalement j'ai quand même l'impression d'une société qui se cherche dans le meilleur des cas d'ailleurs, c’est-à-dire qu'elle n'a pas trouvé son équilibre par rapport aux avancées scientifiques, psychologiques, aux avancées sociales. J’ai l'impression d'une société qui est un peu en roue libre et une société qui a peur, peur de l'avenir, peur du changement, et cela se reflète dans l'Église. C'est pareil ! Je fréquente moins maintenant les paroisses ou autres... mais j'ai l'impression globalement d'une diminution considérable de la pratique, d'une espèce de tassement, d'attente, je suis un peu pessimiste sur la société, mais encore une fois j'ai des scrupules à en parler, parce que je vis pas mal en retrait. Ici nous sommes à la campagne, je serais à Paris, ce ne serait pas pareil. Si on ne va pas à la société, elle vient peu à nous, il y a des groupes heureusement de temps en temps.

Là il y avait un groupe de Chinois ?
Oui, oui ! Heureusement, ils viennent visiter [NDLR. : le couvent de la Tourette a été conçu par Le Corbusier et à ce titre, classé au « Patrimoine mondial » par l'Unesco]. Mais ce ne sont pas des groupes qui viennent partager leurs recherches ou leurs inquiétudes, leurs doutes ou leurs questions. Je fais pas mal de visites, j'aime beaucoup ça et c'est toujours très intéressant, justement parce qu’ à travers la visite, à travers l'architecture, à travers les formes, l'histoire de la construction, on peut faire passer pas mal de choses finalement.
On a parlé de l'évolution de la société, vous avez évoqué un peu l'état actuel de l'Église, comment vivez-vous l'évolution de l’Église ?
J'ai un peu l'impression d'un certain retour en arrière, l'impression, c'est qu'il y a beaucoup de gens qui avaient fait des avancées et qui maintenant s'inquiètent un petit peu et reviennent à ce qu'ils appellent des fondamentaux, un peu en retrait. Une frilosité pour ne pas dire une certaine peur.

Vous parlez de frilosité, c'est une frilosité institutionnelle, intellectuelle ? Ou une frilosité qui ne se traduit pas des comportements ?
Des comportements, oui ! On retrouve pas mal de rites qu'on avait plus ou moins abandonnés ou qu'on avait laissés de côté. Ça, ça revient. Les grands succès des pèlerinages sont revenus il y a peu de temps. Les grands succès de Lourdes, ça c'était plutôt tassé, ça c'était un peu calmé, je n'ai rien contre, mais c'est le déséquilibre qui me gêne un peu. L'équilibre entre l'engagement social, politique, technique des chrétiens a tendance à diminuer au profit du retour à un certain classicisme d'attitudes, de comportements et de choix. Mais bon ! Je vois ça de ma fenêtre...

Ici il y a de grandes fenêtres...
Oui mais ici elles donnent sur la verdure.

Alors dans tout ça comment voyez-vous l'avenir, de la société, de l'Église ?
Pour pouvoir répondre sérieusement à une question comme celle-là, il faut être encore engagé, ce que je ne suis plus, ni dans la société, encore une fois je vis encore pratiquement à 99%, sauf les vacances, ou exceptionnellement quelque chose, je vis dans un parc forestier. Du point de vue social et du point de vue chrétien c'est un peu pareil, je ne vais pas dans les paroisses, je n'ai pas de groupes, il y a des groupes qui viennent ici mais ce sont des groupes très spéciaux.
Je ne peux pas porter un jugement sur l'Église en général, parce que pour moi, on ne peut la percevoir au plus juste, que du côté des paroisses ou des mouvements classiques. C'est là-dedans que l'on peut voir son évolution, dans un sens ou dans un autre, ou bien la stagnation, autrement si vous avez des groupes, des mouvements un peu dynamiques, interactifs en général, ce n'est pas l'Église, donc vous ne pouvez pas juger ça serait faux.

Mais vous avez eu une expérience un peu pastorale quand même, quand vous étiez à Boscodon [NDLR : Abbaye de Boscodon près d'Embrun dans les Hautes-Alpes]
Je parle d'ici ! Puisque vous parlez de Boscodon, mais je dirais aussi d'ici, ou de mon expérience de Corbeil- Essonnes, je dirais que quand il y a sur place une structure d'Église dynamique, qui avance, qui propose, qui pose des questions etc. il y a un peuple pour la suivre, c'était tout à fait le cas à Boscodon, on avait un clergé, un évêque, qui donnaient la possibilité, le goût et l'envie d'aller en avant et du coup les gens suivaient volontiers, mais si vous avez une Église officielle, si vous avez un clergé et une élite, des animateurs de mouvements qui sont plutôt en retrait, attentistes, hésitants ou qui se posent trop de questions, le peuple retrouve spontanément des pratiques, des dévotions, des ronrons ou il s'en va. Je crois qu'une des figures typique de cela, c'est le pape François pour autant que je puisse en juger. Je n'ai rien à lui reprocher, c'est un homme certainement très bon, très fraternel, très ouvert, très sympathique, très amical, on ne peut pas rêver mieux, sauf que je trouve qu'il ne fait rien... il ne bouge pas. Pour gérer il est parfait, mais est-ce que l'Église a besoin de gestionnaires ou a besoin de prophètes, toute la question est là !

On en arrive au message que vous pourriez délivrer maintenant à vos frères chrétiens, au monde, quel est votre testament si vous voulez ?
Je dirais que je rêve d'une Église véritablement engagée dans, je dis bien dans, et au service de la société, je pense que notre société mondiale, pas seulement française, est à un virage, est à un moment culturel et scientifique et que la société a besoin de prophètes, de gens qui l'aident à donner un visage humain, au sens presque divin, je pense à Jésus-Christ : homme et Dieu. Des prophètes qui proposent en lui disant : « Mais tu as les atouts, tu as des possibilités extraordinaires, tu as des chercheurs, tu as des techniciens, qu'est-ce que tu fais de tout ça ? » N'y a-t-il pas une nouvelle humanité à construire, une société à mettre en place, de nouveaux rapports, de nouvelles significations, des fonctions et des identités etc. ? Aussi bien des identités nationales et internationales, qu'est-ce que ça veut dire être Français aujourd'hui ? On s'en moque un peu. Non mais franchement on en est encore là ! Quand j'entends certains hommes politiques, j'ai envie de pleurer, parce qu’enfin qu'est-ce que l'on en a à faire de ce discours et de ce langage. Il y a des injustices que l'on connaît maintenant, avec la télé et avec tous les moyens modernes, il y a un chantier extraordinaire pour l'humanité. Alors que tous les pays s'engagent là-dedans ! Les chrétiens devraient être à la pointe de tout ça ! Mais pendant ce temps-là, on va vers notre petite élection présidentielle, mais quels que soient les candidats cela sera pareil [NDLR : l'entretien a été réalisé en septembre 2016, pendant la campagne à la primaire pour désigner le candidat de la Droite et du Centre à l'élection présidentielle de 2017.] Et puis dans l'Église on a un bon pape, on a de bons évêques, on a de bons curés, ça manque complètement de.... Il faut être un peu révolutionnaire... alors là je retrouve mai 68. Le feu de mai 68 ne s'est pas tout à fait éteint en moi. L'Église a besoin de s'arracher à elle-même pour prendre la tête, participer disons à la tête de l'humanité. Dieu merci il y en a quand même, je noircis un peu le tableau, car il y a quand même des gens qui agissent, heureusement dans la société et dans l'Église, mais ce n'est pas la majorité.