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Thèmes / Paul de Tarse / Vos questions, vos remarques / Conformément aux Ecritures...

Conformément aux Ecritures...

Dans sa proclamation du kérygme en 1Co 15, 3-4 Paul insiste par deux fois: Christ est mort pour nos péchés, selon les Écritures,...il est ressuscité le troisième jour, selon les Écritures. Je me suis demandé quelles étaient ses sources dans les Écritures, en regardant les notes de la TOB. La première mention (Christ est mort pour nos péchés) renvoie au Serviteur souffrant d'Isaïe. Admettons, bien qu'il soit clair que ce Serviteur souffrant n'est pas le Messie attendu. Mais pour la résurrection le troisième jour, on renvoie à Jonas, trois jours dans le ventre du poisson, ou à Osée (Os 6,2), qui proclame que le Seigneur nous guérira, au troisième jour il nous aura relevés (nous, pas le Messie). Si je puis me permettre un jeu de mots, il faut oser! Le rapprochement avec la Passion-résurrection me paraît bien ténu. Est-ce que Paul n'en rajoute pas, peut-être pour se montrer tout aussi "judéo-chrétien" que ses contradicteurs à Corinthe, tout aussi ancré dans la tradition biblique?

Créé par : Claude Mandil

Date de création :

Commentaires

Posté par Roselyne

lun 10/02/2025 - 22:06

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Vous avez fort bien vu les problèmes ! Oui, les disciples, Paul et bien d'autres, se sont retournés vers leur tradition, les Ecritures juives en hébreu comme en grec, pour essayer de dire ce qu'ils avaient vécu d'inouï : celui qu'il considérait comme le Messie d'Israël, le Christ, Fils envoyé de Dieu, était mort crucifié ... et un jour (trois jours après !), ils l'avaient rencontré vivant. 
Comment fait-on pour dire ce qui n'a jamais été vécu ni exprimé, ce qui n'est même pas pensable (Paul le dit bien : "ce que l'oeil n'a pas vu, ce que l'oreille n'a pas entendu, ce qui n'est pas monté au coeur de l'homme", 1 Co 2, 9) ? On cherche dans sa culture, dans sa tradition : les attentes d'Israël et les promesses de Dieu que les livres bibliques relataient et que l'on savait par coeur...
J'ai envie de dire (mais j'ai tort, je crois) que pour la résurrection, c'était plus simple, car depuis près de deux siècles, la foi pharisienne avait forgé une première représentation de la résurrection finale, à la fin des temps, avec les verbes : se réveiller, se relever (voir Isaïe 26, 19, Daniel 12, 1-3), et le troisième jour est le jour où Dieu intervient enfin... à la fin des temps (Osée 6, Jonas 3 etc.). Ils ont alors compris que la résurrection attendue était déjà commencée, en marche, Jésus est "le premier-né d'entre les morts" (Co 1, 18). Voyez une expression extraordinaire en Matthieur 27,51-54).
Mais un Messie souffrant et crucifié, c'était tout simplement impossible. Et pourtant ils ont trouvé dans leurs Ecritures la figure du juste  souffrant (Psaume 22 et 69, largement utilisé dans la passion selon Marc), et le serviteur souffrant d'Esaïe 50, 1-4 ; 52, 13-53, 12 (utilisé davantage par Luc dans le récit du dernier repas et de la mort de Jésus). 
C'était peu. Pourtant les affirmations sont massives : en Luc 24, à deux reprises Jésus explique aux disciples les Ecritures, en leur montrant qu''il fallait que le Messie-Christ souffre" etc. Les discours de Pierre dans les Actes des Apôtres s'appuient sur d'autres psaumes (Ps 15) etc.
Vous me dites avec raison : c'est ténu...
Oui, tellement ténu qu' il faut continuer à affirmer que les Ecritures juives ne conduisent pas à un Messie souffrant et ressuscité , et qu'il est légitime de continuer à les lire pour elles-mêmes, sans jamais aboutir à une perspective chrétienne ! Les Juifs pour la plupart sont restés juifs et savent pourquoi...
Et pourtant, les chrétiens ont massivement considéré que les Ecritures annonçaient Jésus Christ crucifié et ressuscité... Il faut, je crois, considérer deux choses :
-d'une part qu'ils relisent désormais les Ecritures à la lumière de la résurrection de Jésus. Ce ne sont  pas les Ecritures qui annoncent Jésus, c'est Jésus mort et ressuscité qui attire vers lui et fait converger sur lui les grandes figures scripturaires. Tout est relu rétrospectivement. Alors tout peut devenir "typologique", l'Exode devient traversée de la mer/mort vers la liberté et la vie ; le prophète annoncé par Moïse en Dt 18 prend les traits d'une annonce de Jésus.... Les Pères de l'Eglise en abuseront, mais on comprend bien, si on se place dans cette perspective,  que beaucoup d'éléments se mettent à converger.
-c'est que d'autre part, de façon beaucoup plus globale, toutes les attentes d'Israël portent sur un Messie davidique, qui prend de plus en plus une tournure de figure eschatologique, notamment dans la littérature prophétique : relisez Esaïe 7, 10-13 ; 9, 1-7 ; 11, 1-9 !
Il y a, surtout chez les prophètes Jérémie et Ezéchiel, un pessimisme profond sur la nature humaine et l'incapacité d'Israël à être fidèle à son Dieu, dépassé par l'idée d'une alliance nouvelle ; en Jérémie 31, 31, ce qui est annoncé, c'est une recréation par Dieu d'un coeur humain capable de fidélité, complice de sa volonté ; et Ezéchiel 36, 36 en rajoute : Dieu enlèvera leur coeur de pierre, pour leur donner un coeur de chair, animé par son propre esprit... Tout cela ne se réalise-t-il pas en Jésus, le Fils parfaitement complice de l'amour et de la volonté du Père ?
Dès lors, on comprend bien que ces disciples de Jésus ont vu s'accomplir en lui les ultimes promesses de Dieu annoncées par les prophètes.
La fin du livre du dernier prophète Malachie annonce l'envoi d'un messager Elie, préparer les chemins du Seigneur. Marc et Matthieu n'auront qu'à reprendre Malachie 3  pour le dire réalisé en Jean-Baptiste préparant la voie à Jésus ....
 

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