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Commentaires

Posté par Roselyne

ven 10/11/2023 - 21:41

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Vous posez des questions immenses (la mission propre à Israël ! Et celle des chrétiens ???), auxquelles je suis, bien sûr, incapable de répondre.
Je vais seulement essayer d'accompagner votre raisonnement.
Comme je suis très "paulinienne", je peux répondre de façon ferme à votre première question en allant d'ailleurs dans votre sens : non, l'élection ne dépend pas du mérite des êtres humains ("tous enfermés dans la désobéissance" Rm 11, 32).
C'est tout le thème de la lettre aux Romains, surtout 1-5 : "il  n'y a pas un juste, pas un seul" (3, 19). Et il faut conclure que Dieu a seul l'initiative de l'élection, qui est totalement gracieuse et gratuite. Et les exemples que vous relevez dans ces premiers chapitres de la Genèse sont suffisamment parlants.

Vous pouvez remarquer d'ailleurs que cela pose question aux rédacteurs bibliques. Ils sont fermement ancrés dans la certitude d'être le peuple élu, mais ils ont le courage de noter d'une part que l'élection est d'abord une charge et une responsabilité : "en toi seront bénies tous les clans de la terre"; de l'autre qu'il y a des peuples bénis par Dieu en dehors et à côté d'Israël : les descendants d'Ismaël au premier chef.

La question tourmentera les rabbis juifs autour des premiers siècles avant et surtout après notre ère ; ils essaieront de réintroduire "les mérites" d'Abraham. Il est très frappant de trouver dans le Targum ancien, comme dans d'autres textes du 1er siècle et plus tard, des essais pour justifier le choix d'Abram par Dieu. Et par exemple le fait qu'il avait déjà à Haran dénoncé et refusé l'idolâtrie de son père et de sa famille pour se tourner vers le Dieu unique. Plusieurs récits vont dans ce sens, illustrant les mérites extraordinaires d'Abram.
Notamment on s'appuyait sur le chapitre 22, où l'obéissance d'Abraham qui accepte de sacrifier son fils était mise en exergue ; la lettre aux Hébreux s'en empare, voyez He 11, 17-19, comme aussi la lettre de Jacques 2, 21.

A l'époque de Jésus donc, les mérites d'Abraham étaient vantés, et  on comprend mieux à la lumière de ces textes juifs ou judeo-chrétiens, la réaction forte de Paul.
Toute la démonstration (compliquée ) de Paul en Galates 3 et  surtout Romains 4, veut montrer qu'Abraham a été reconnu juste par Dieu à cause de sa foi (Gn 15, 6), bien avant l'épisode du ch. 17 (la circoncision) et celui du ch. 21 (Isaac). Foi au sens de confiance, qui n'est jamais un mérite, mais un consentement à la promesse et à l'alliance offertes de façon purement gratuites par DIeu.
On peut relire aussi à la lumière de ce contexte le chapitre 8 de Jean, et le débat de Jésus avec ses contradicteurs.

Depuis les années 1998-1999, un accord a été trouvé entre l'Eglise catholique romaine et la Fédération luthérienne (plus tard rejointe pas les Réformés) sous la forme d'un consensus différencié, pour affirmer que dans la "justification" et le "salut" de l'être humain, Dieu a toujours  l'initiative,  que nous sommes tous sauvés par pure grâce, étant requise notre réponse de foi, sans tenir compte de mérite quelconque. Ensuite la justification "oblige", mais c'est une autre histoire !

Tout cela pour dire que l'élection est choix libre de Dieu, qui a choisi son peuple Israël, et qui en son fils Jésus le Christ nous a choisis aussi pour accueillir dans la foi sa parole, sa justice et son salut. Paul dit même que c'est la foi de Jésus qui est première et que tout ce que nous avons à faire est d'entrer dans cette foi qui nous conduit au Père.

Autant dire que les Juifs comme les chrétiens se reconnaissent l'objet d'un don inouï et gratuit de Dieu, qui est en même temps une immense responsabilité, vis-à-vis du monde.  Cela ne signifie absolument pas qu'il n'y a  pas d'autres voies vers Dieu, et je crois que chacune des grandes religions et philosophies du monde, comme la vie quotidienne de bien des êtres humains qui ne connaissent pas Dieu, peuvent être autant de voies d'humanisation et de salut pour l'humanité.
Cela signifie seulement que nous nous reconnaissons une responsabilité particulière.
Quant à distinguer celle d'Israël et celle des Chrétiens, il y faudrait des livres et une compétence que je n'ai pas.
Je dirais très approximativement qu'Israël est chargé de maintenir, de garder et d'honorer le nom du Dieu unique au milieu des nations. Et que les chrétiens sont chargés d'annoncer à tout être humain l'amour paternel de ce Dieu, et la fraternité au nom de Jésus le Christ, Fils de Dieu qui nous conduit vers lui.


 

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