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Commentaires

Posté par Roselyne

mar 21/03/2023 - 09:43

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J'admire votre courage et votre détermination ! C'est tout de même effarant qu'un catholique comme Wénin qui a enseigné à l'Institut biblique pontifical à Rome, avant d'être doyen de l'Université catholique de Louvain, vous écrive : "vous n'arriverez  à rien". Certes, André Wénin est un homme doux, qui n'aime pas les affrontements, mais tout de même !
Vous donnez vous-même la réponse à vos questions : la grande peur. La peur de soulever la tradition millénaire, et plus encore la peur d'un monde entièrement masculin et patriarcal pour qui la femme ne peut être qu'une aide ménagère ou autre, en tout cas seconde, sinon secondaire !
Je ne crois pas aux rivalités entre exégèses. J'ajoute seulement dans le cas de Wénin, la peur aussi de l'influence psychanalytique dans sa lecture des textes... Et on comprend pourquoi les autorités catholiques ont peur de ce type d'analyse...
Que cela ne vous arrête surtout pas, il faut lire et diffuser votre lecture, sur tous les tons, en tous les lieux. Auprès des catéchistes, auprès des jeunes, auprès des bons chrétiens en suscitant des groupes bibliques...et autres.
Très amicalement
Roselyne

Posté par Geneviève (visiteur)

jeu 13/04/2023 - 10:37

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A mon avis, saint Grégoire de Tours répond à cette question dans son "Histoire des Francs", (collection les Belles Lettres – 2ème partie – livre VIII)
« Pendant ce synode un des évêques se leva pour dire qu’une femme ne pouvait être dénommée homme ; mais toutefois il se calma, les évêques lui ayant expliqué que le livre sacré de l’Ancien Testament enseigne qu’au commencement, lorsque Dieu créa l’homme « il créa un mâle et une femme et il leur donna le nom d’Adam » ce qui signifie homme fait de terre, désignant la femme aussi bien que le mâle : il qualifia donc l’un et l’autre du nom d’homme. D’ailleurs, Jésus Christ est appelé fils de l’homme parce qu’il est le fils d’une vierge c’est-à-dire d’une femme et lorsqu’il s’apprêta à changer l’eau en vin, il lui dit : « Qu’y a-t-il entre moi et vous, femme ? » etc. Cette question, ayant été réglée par beaucoup d’autres témoignages encore, fut laissée de côté ».
En outre, je lis dans une note de bas de page de ce livre : « Ce passage célèbre a fait l’objet de nombreux commentaires. Dans un article sur l’âme de la femme de l’encyclopédie "Catholicisme hier, aujourd’hui, demain", G. Marsot observe justement qu’on possède les actes du concile de Mâcon et qu’ils ne contiennent aucune allusion à la question posée par l’évêque ni à l’usage du terme homo. Il en conclut que l’objection soulevée fut hors programme et que la difficulté n’était pas d’ordre philosophique mais linguistique. Il résume un examen détaillé du texte de Grégoire de Tours fait par H. Leclerc dans le "Dict. d’archéologie chrétienne" dont le passage essentiel est le suivant : « Un évêque qui n’était peut-être pas des plus instruits, cela se voyait alors, interrogea ses collègues et crut peut-être les embarrasser en leur demandant si le mot homo s’appliquait aux femmes comme à l’homme. Et c’est tout. Les confrères lui montrent par des exemples appropriés au goût du temps que la femme peut être désignée par le mot homo et pour l’en convaincre ils ne lui disent pas que les femmes ont une âme tout comme les hommes, car la chose n’est pas en question. »
Le mot latin homo désignait et désigne encore les humains ; quand on parle d’homo erectus ou d’homo sapiens, il ne s’agit pas seulement des êtres humains masculins. Le latin désignait les hommes par le mot « vir » et les femmes par le mot « mulier ». Peu à peu dans notre langue française courante, le mot homo désigna les seuls êtres masculins mais dans la langue savante, le mot homme (par convention il était d’usage de mettre alors une majuscule) désigne encore les humains. Les droits de l’Homme sont ceux de l’homme et de la femme.
Ainsi, dans mon dictionnaire le Petit Robert, je lis au mot homme : « A : Être appartenant à l’espèce animale la plus évoluée de la Terre ; B : Être humain mâle ». Certes, la confusion entre les deux acceptions du mot « homme » est dommageable mais naguère, les gens instruits savaient faire la différence. Donc, tant que l’Académie Française acceptera cette première signification du mot homme, les traducteurs de la Bible seront autorisés à traduire le mot latin homo par homme.
En conséquence, vous n’avez pas reçu de réponse car ce problème est traité depuis longtemps, au moins depuis saint Grégoire de Tours.
Ce qui me choque surtout, c’est la propension des membres de la CCBF à chercher querelle à notre Eglise à propos de tout et rien et surtout à propos de tous les préjugés éculés propagés par les anticléricaux qui conglutinent, contre Elle, tous les catholiques s’autoproclamant « d’ouverture ». Non, mesdames, ce monde d’hommes ne pense pas que la femme, créée en second, est inférieure à l’homme. Ce monde d’hommes sait que le mot latin homo signifie humain et que Dieu a créé l’être humain, mâle et femelle.
D’ailleurs, dans la Bible, la domination du mâle commence après que la femme a goûté du fruit défendu : « Ton désir te poussera vers ton homme et il te dominera », et non pas, comme vous le prétendez, dès la création d’homo.

Posté par Roselyne

lun 17/04/2023 - 16:44

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Merci pour cette belle démonstration, avec un détour remarquable par Grégoire de Tours, qui me réconforte et me réjouit, il y a toujours eu des évêques intelligents !
Mais sur le problème actuel des querelles cherchées à l'Eglise, je serai plus nuancée que vous.
Je suis bien d'accord pour ne pas accuser l'Eglise à tout propos, d'autant plus que nous sommes à la fois dans l'Eglise et l'Eglise elle-même, et je me revendique membre du corps, si imparfait et insuffisamment  actif soit-il.

Mais si j'ai une petite  responsabilité dans le corps, c'est celle de la traduction/diffusion/transmission du texte biblique et de l'effort qui doit être fait à chaque nouvelle génération pour traduire le texte de la façon la plus fidèle possible, ce qui inclut le fait qu'il soit compréhensible et audible pour cette génération.
Je m'explique sur un exemple que j'ai vécu, en défendant personnellement une traduction du NT devant la Commission doctrinale des évêques de France (il s'agit de la Nouvelle Français Courant, pour laquelle nous avons obtenu l'imprimatur). Si on traduit "Jésus fut conduit dans le désert par l'Esprit pour y être tenté par le diable", bon nombre de lecteurs (notamment les jeunes auxquels cette traduction s'adresse) y verront une tentation d'ordre moral. Or il s'agit de l'épreuve de la foi, telle qu'elle a été vécue par le peuple dans le désert : faire confiance à Dieu, ou se dresser contre lui pour exiger nourriture et bien-être; faire confiance à Dieu et s'en remettre à lui ou prendre sa place et se faire dieu à la place de Dieu ?
Le texte dit  "mettre Dieu l'épreuve". Et c'est exactement ce que le diable propose à Jésus : contraindre Dieu à agir, mettre la main sur lui. Et Jésus répond en citant le récit du désert : "tu ne mettras pas à l'épreuve le Seigneur ton Dieu". La foi, c'est le contraire de la vérification, c'est accepter d'être fils et de dépendre du Père.


Je reviens sur l'exemple de la "côte" d'Adam, qui est une mauvaise traduction, le terme hébreu signifiant "côté" comme le texte grec ; on sait que la traduction latine de la Vulgate "costa", qui signifie d'abord "côté, flanc", puis "côte", a entraîné une interprétation qui ne rend pas compte du texte et qui aujourd'hui ne peut que choquer le lecteur contemporain. Pourquoi ne pas la corriger ?
Ce n'est pas chercher querelle à l'Eglise que travailler sur les questions de langage qui sont essentielles pour la communication et la transmission aujourd'hui... Pourquoi ne pas ouvrir sereinement le débat ?
Ce serait honorer pleinement le texte biblique, qui est lui-même un texte en débat, à la fois inscrit dans un patriarcalisme massif et en partie inconscient, et travaillé par des courants différents qui voient autrement la complémentarité homme/femme, vir/mulier si vous voulez.